Nourrir l'humanité

Entre autres croissances, il y a la croissance de la population mondiale. Elle est un critère indéniable d'inquiétude, puisqu'elle pose directement la question de nourrir l'humanité.

Les projections (nécessairement floues sur une telle période) nous amènent à supposer qu'on sera entre 9 et 13 milliards d'humain à la fin du siècle, sachant que nous sommes actuellement environ 7 milliards, et nous étions la moitié voilà 40 ans.

Il existe deux moyens simples de nourrir tout le monde :
– Produire davantage de nourriture en réduisant la part de territoire attribué à l'alimentation du bétail, et donc manger moins de viande ;
– Réduire la quantité de la population par des politiques natalistes, consistant à limiter les naissances.

Entre autres observations, il faut bien voir que la démographie est stable voire déclinante dans les pays industrialisés et qu'elle progresse encore dans les autres pays. Aussi, quel que soit le pays, même « pauvre », on s'aperçoit que la natalité a tendance à se tasser. Dans les pays où l'éducation grimpe, la natalité baisse.

Parmi ce que je lis ou ce que j'entends autour de moi, je m'aperçois d'un clivage entre 2 arguments :

– Soit vous voulez défendre le droit à donner la vie en asservissant la population mondiale à une alimentation végétarienne et vous être un sale gauchiste ;
– Soit vous préférez conserver votre confort, rejeter l'idée de changer quoi que ce soit à vos habitudes de pays riche, rejeter la faute sur les pauvres qui font trop d'enfants, et vous êtes un sale néolibéral.

Faisons simple : Un libéral affame un pauvre pour manger de la viande, un gauchiste nourrit un riche aux légumes pour nourrir ce pauvre.

C'est précisément là que s'opère le cynisme. « Notre natalité est exemplaire, faites-en autant ». Sauf que ceux qui disent ça n'ont pas du tout un mode de vie exemplaire. L'ordinateur qu'ils utilisent a coûté quelques vies au Congo pour des terres rares, en Chine pour recycler des composants, la déforestation d'Amérique du sud pour nourrir et produire de la viande, et finalement toutes les guerres du Moyen Orient pour s'emparer du pétrole permettant de faire tourner tout ça.

Il est cynique de vouloir continuer cette mascarade au prix d'un contrôle des naissances dans les pays qu'on pille.

Il y aura peut-être un jour un contrôle des naissances. Mais pas avant d'avoir fait notre part d'efforts, qui consistent simplement à assumer notre responsabilité en étant exemplaires.

Commentaires

1. Le 13. mai 2016, 7h36 par Luxor

A propos de projections, parmi les scénarii du club de Rome ("Limits to growth" ... mal traduit "Halte à la croissance" ce qui n'a pas arrangé sa diabolisation), il y'en a un qui a été confirmé tous les 10ans depuis 1972

http://www.societal.org/docs/cdr2.h...

malheureusement, il mène à un effondrement pas joyeux (de la population entre autres)

( pour le scénario qu'il "aurait fallu" suivre pour limiter les dégats : http://www.societal.org/docs/cdr1.h... )

2. Le 15. mai 2016, 1h54 par Doc Folamour

André Gorz dit que l'homme a tendance à sacraliser son environnement immédiat. Dans les sociétés modernes industrielles, ça signifie que ce que nous sacralisons, c'est la technologie, la ville, les bagnoles, les gadgets électroniques, et partant de là notre mode de vie consumériste.

Donc, ça me semble mal barré pour faire en sorte qu'un grand nombre de gens renonce à certains comportements qui foutent en l'air la planète et ruinent les pays pauvres.

De plus, même quand on sait les nuisances générées par notre comportement, on a parfois du mal à y croire (moi-même j'ai parfois du mal à y croire, à réaliser), parce que simplement, les conséquences désastreuses de tout ça sont le plus souvent loin de nous (en Chine, en Afrique, au Brésil). Il nous faudrait avoir des yeux qui voient toutes ces catastrophes à la fois, en temps réel, en permanence, et un cerveau conscient qui fasse le lien, de manière quasiment visuelle, avec nos habitudes de consommation. Car en fait, nous avons un mode de vie mondialisé mais une conscience et des perceptions limitées à notre environnement immédiat.

Et même si nous avions ces yeux et cette conscience, il y aurait peut-être cette maladie universelle qu'est le déni, maladie qui pousse par exemple les aveugles volontaires à nier l'existence des chambres à gaz ou la réalité du dérèglement climatique, parce que ça les arrange.

3. Le 17. mai 2016, 10h21 par Doc Folamour

Oups! je me suis trompé. La réflexion que je prêtais à André Gorz est en fait de Jacques Ellul. Voir ce chapitre de la page wikipédia qui lui est consacrée:

https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacqu...

4. Le 18. mai 2016, 7h44 par Jul

Pour moi il y a un avant et un après Internet : les yeux sont partout. Quand on a un accès Internet (non censuré) impossible d'ignorer ce qui se passe. Et bien souvent cet accès est permanent et dans la poche !
Donc environ 40 % de la population mondiale est soit dans le déni soit dans l'inaction.
Mais tout est fait pour que ce soit difficile de changer (pub, TV, travail, crédit etc.) et n'étant pas les premiers menacés on se sent peut concernés...

Avant je pensais qu'il faudrait tôt ou tard se pencher sur la question épineuse de la natalité mais maintenant je crois plutôt que les dérèglements anthropiques en cours vont se charger de faire baisser la population...

5. Le 19. mai 2016, 1h38 par Lulu

@Doc Folamour :

pas grave, ce sont 2 bons auteurs...

Pour rester à peu près dans le sujet, on peut citer ça de Gorz :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Andr%...

" Gorz considérait la sobriété, également appelée simplicité volontaire, comme une nécessité pour lutter contre la misère. L'énergie étant limitée, la surconsommation des uns condamne les autres à la misère.
[...]

Selon André Gorz, on est pauvre
au Viêt Nam quand on marche pieds nus,
en Chine quand on n'a pas de vélo,
en France quand on n'a pas de voiture,
et aux États-Unis quand on n'en a qu'une petite.
[...]

En revanche on est miséreux quand on n'a pas les moyens de satisfaire des besoins primaires : manger à sa faim, boire, se soigner, avoir un toit décent, se vêtir.
[...]
"

Ajouter un commentaire

Le code HTML est affiché comme du texte et les adresses web sont automatiquement transformées.

Fil des commentaires de ce billet