J'aime la police

Je ne dis pas que j'aime les flics. En fait, je ne connais pas assez bien ces agents pour dire si je les aime.

Non, ce que j'aime, c'est un idéal. L'idéal que des gens donneraient de leur temps pour défendre les plus vulnérables. Car c'est bien là le rôle de la police : faire appliquer la loi. La loi sert à protéger les faibles des puissants. C'est un peu la sécurité sociale appliquée aux rapports entre les gens. Protéger les victimes de ceux qui ont le pouvoir de nuire. Quand une voiture se gare sur un emplacement réservé aux piétons, la police se placera du côté du plus vulnérable, le piéton, et sanctionnera celui qui se permet de faire un écart, l'automobiliste. Elle le fera sans attendre qu'une maman ne fasse descendre sa poussette sur la chaussée. Sans même penser à cette éventualité. Il le fera parce qu'on a défini une loi qui protège ceux qui ne sont pas en voiture.

Mais cette belle idée de la police est en train de se dessécher. Pas juste cette année, mais depuis longtemps. Peut-être depuis qu'elle s'appelle « gardien de la paix » ou « de l'ordre ».

Récemment, alors que j'étais arrêté en vélo à un feu rouge, à la hauteur de 2 policiers en moto, je leur montre une Porsche garée à contre-sens et en plein milieu du trottoir. Pour se garer ainsi, il avait au moins traversé une ligne blanche et une piste cyclable. Je leur demande pourquoi ils ne la verbalisent pas. Réponse « Il ne gêne pas ». C'est certainement devenu vrai, car je ne croise jamais de fauteuils roulants dans cette rue. La Porsche a gagné sur les paraplégiques, qui auront ajusté leurs trajets vers d'autres rues qui ne leur posent pas encore de problème.

Je dis aux flics que si le passager de la voiture ouvre la portière, il peut tuer un cycliste, mais la réponse est que l'automobiliste fera attention. C'est sûr : un cycliste peut tout à fait faire confiance à un chauffard capable de dénigrer les piétons, les poussettes, les fauteuils roulants au point de se garer comme s'ils n'existaient pas...

Ces flics n'ont à mes yeux pas fait leur boulot. Mais ce cas devient la norme. Tant que vous ne faites pas trop de bruit, on vous laisse faire, car cette police ne préserve plus que « la tranquillité ». Si je me permettais de faire respecter moi-même la loi en aspergeant la Porsche de blanc d'Espagne ou en déplaçant la voiture jusqu'à un stationnement valide, je pense même que c'est moi qui finirais en garde à vue.

Ce jour-là, la police protègerait la Porsche mal garée qui a traversé une ligne blanche.

Je regrette déjà cette police qui n'est plus là pour protéger les pauvres, mais juste taper dessus quand ils râlent trop fort. On en voit plein dans les manifs.

Commentaires

1. Le 23. septembre 2016, 1h06 par Bernard

Si on tire ce petit fil, effectivement, on arrive très vite à des questions fondamentales, de l'ordre des institutions, de la constitution, de la séparation des pouvoirs.
La police ne se vit pas elle-même comme une force de la Loi, mais comme les "forces de l'ordre". Les policiers ont une profonde culture professionnelle de l'ordre, et une culture du droit et de ses principes très défaillante.
Il est intéressant de remarquer qu'un citoyen qui évoque la Loi ou les Droits de l'Homme (donc la Constitution) dans un commissariat est vite perçu par les agents comme un adversaire, un danger, un fauteur de troubles (contre l'ordre).
Comme vous le décrivez très bien, les policiers face à vous ont privilégié l'ordre et n'ont pas souhaité appliquer la loi, pour ne pas créer de désordre ! De là à défendre aveuglément l'ordre établi, jusqu'à cacher des pièces dans les enquêtes sur les violences policières, il n'y a qu'un pas, et c'est la même logique qui est à l'oeuvre.
L'argument "c'est illégal" ne touche absolument pas un agent de police contemporain.
Le culte de la Loi, qui est le fondement de l'état de droit, est donc tout simplement totalement étranger à la culture d'un des 3 pouvoirs de notre semi-république : le pouvoir exécutif.

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