Santé

Tout ce qui touche les mutuelles, l'assurance santé, et la question de savoir où on se situe entre la vie et la mort.

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12. janvier 2017

Le retour de la lèpre

François Fillon avait proposé de faire des ajustements sur la Sécu, il y a quelques temps, de façon qu'elle ne s'occupe pas des petits trucs bénins, mais seulement des grosses maladies qui en imposent. Les cancers, les culs de jatte, les lépreux et les gauchistes. Pour le reste, démerdez-vous avec le privé.

Mais compte tenu des charges qu'il se prend depuis, il a fait un mea culpa à la presse et retiré la proposition de son site. Non pas pour dire qu'il avait tort, mais qu'il avait été mal compris. Donc pas du tout un mea culpa. Il continue de penser qu'il a raison. Il est donc important d'expliquer à quel point il a tort.

Vu qu'il est plutôt libéral, on s'attendrait à ce que son projet soit plutôt « logique ». Comprenez ici que je n'en pense pas un mot. Donc on va faire une liste de maladies non remboursées, donc chères : les moins graves.

On aurait donc les troubles musculo-squelettiques (tendinites chroniques, tout ça), qui est la maladie typique du travail avant le suicide. Il y aurait aussi les grippes (parce qu'il faut vraiment être vieux pour en mourir), les petites infections, petites fièvres, grains de beauté douteux, boutons, rougeurs, plaques et machins qui grattent de toutes sortes, etc.

Le problème, quand même, c'est que la peste, le choléra, la syphilis, la variole, ça commence justement par ce genre de désagrément. Mais cela ne laisse pas toujours le temps de se demander si on a les moyens de payer ou pas. Et à supposer qu'on se paie le luxe d'attendre, leur hypothétique guérison est très chère. Déjà que la gale revient...

Notre François prévoit aussi une règle d'or imposant des comptes à l'équilibre pour l'assurance maladie, le prix d'une pandémie dépassera alors certainement un petit peu.

Car les médecins sont aussi là pour détecter les nouvelles maladies, épidémies parfois, qui peuvent simplement commencer par des petits trucs qui grattent, qui gênent ou des petites fièvres.

Même si j'étais libéral, je ferais tout pour éviter que la peste ne se répande à nouveau dans les rues. Vous imaginez l'inconfort des riches ? Ne plus pouvoir sortir de chez soi sans croiser des lépreux ? Déjà que les sans-dents font désordre...

En fait, cette proposition était tellement stupide qu'il s'est pris un vent de son propre bord. Mais quand même, il faut voir qu'il a osé penser à un truc pareil. Ça fait froid dans le dos. Rien ne dit qu'il ne le ressortira pas une fois élu : il n'attend que ça. Il prétend que c'est nous qui ne l'avons pas compris. Mais on a très bien compris qu'il est dangereusement stupide.

Imaginez un second tour de présidentielle entre celui-là et la blonde... faudra vraiment sortir pour aller voter ?

13. décembre 2016

Vive le Téléthon !

Grâce à l'aide de toute la population française, nous allons enfin sauver des milliers de personnes et faire avancer la recherche !

Mais... vous ne voyez pas comme un problème, juste là ? Et bien il se trouve que jusqu'à maintenant, j'imaginais que c'était surtout le rôle de l'État, ou à défaut, d'une entreprise de service public, de sauver les gens et faire avancer la recherche.

Loin de moi l'idée d'interdire à des entreprises de travailler sur ce domaine. Mais le privé n'est pas vraiment connu pour sauver les gens. Ou alors, vraiment seulement si ça rapporte. Ainsi, lorsqu'une maladie est décrétée « pas rentable », aucune entreprise ne fait de recherche. Autant vous dire qu'elle était motivée à sortir le Viagra.

Mais sans être franchement gauchiste, on peut tout à fait comprendre que là où les entreprises boudent, le service public se doit d'être présent, non ? Il est vrai qu'il préfère peut-être mettre de l'argent là où il y a vraiment du monde à soigner. Le SIDA, par exemple, lorgne avec jalousie les dons faits au Téléthon.

Parce que finalement, on nous fait un super show télé avec des célébrités, des chansons, tout ça, et finalement, quand on fait la collecte, on vous a vendu du rêve. C'est merveilleux. Mais revenons sur Terre. La Myopathie touche 5000 personnes en France (limitons à ce territoire pour comparer). La maladie d'Alzheimer touchera 1 200 000 personnes en 2020, en forte progression, malgré les décès. Maladie qu'on attrape de plus en plus jeune. J'aurais pu comparer avec le SIDA, la sclérose en plaques ou des tas d'autres maladies qui n'ont aucun traitement (dites orphelines).

Alors évidemment, lorsque vous avez une personne malade dans un fauteuil devant vous, forcément c'est concret, c'est difficile. On veut le sauver, c'est humain. Préférez-vous sauver un myopathe, 30 scléroses en plaques, ou 168 « vieux » atteints d'Alzheimer ? Je ne vous propose pas ce méchant dilemme par cruauté. Mais pour rappeler qu'au-delà des maladies qu'on vous présente à la télévision, avec force paillettes, il y a de nombreuses personnes qui dépérissent, faute de traitement.

Il faut savoir que ce sont essentiellement des particuliers (1 million) qui donnent (84% du bilan) surtout les revenus modestes (en proportion de leurs revenus), car les français sont très généreux. Très peu d'entreprises (10% établissements de soins compris pour moitié). La gestion + collecte coûte 15% des recettes. Personne n'a été guéri en 30 ans (pour un total de plus de 2 milliards d'euros donnés).

Ne vous méprenez pas : je VEUX que l'on fasse de la recherche pour soigner les myopathies. Il serait simplement cruel que ce Téléthon fasse de l'ombre aux autres maladies. J'aimerais aussi qu'il ne s'agisse pas que des donations de pauvres là où l'État devrait prendre sa part (avec un impôt correctement réparti là où l'argent se trouve). C'est à ça que sert l'impôt.

Sinon, pour aider les maladies rares, il y a d'autres moyens.

20. avril 2016

CMU en honoraire libre

J'ai récemment dû aller chez un ORL. Il se trouve que pour des histoires de paperasse administrative, j'allais avoir une rupture de ma CMU dans un mois, et je devais voir un ORL de préférence avant cette date. J'ai pris le premier que j'ai trouvé, pas trop loin de chez moi.

Il est bon de savoir qu'avec la CMU, les médecins ont obligation d'accepter les tarifs conventionnés et les patients concernés ne doivent jamais sortir d'argent (tiers payant). Il arrive en région parisienne que les médecins évitent les pauvres pour cette raison (bien que ce soit interdit).

En entrant chez lui, j'avais repéré sur la plaque « ORL expert près la cour de justice de machin ». Oulà, il doit s'y connaître le bougre...

Après une attente, un très vieil homme ouvre. Cheveux absolument blancs, dur de la feuille, il m'invite à entrer dans un bureau entouré par des piles menaçantes de classeurs. Il me pose des tas de questions, notamment sur ma profession.

– Sans emploi.
– Je ne vous demande pas votre métier, mais votre profession, monsieur. Un métier est ce que l'on exerce pour gagner sa vie, une profession, c'est ce à quoi on se destine.

Je viens juste pour des acouphènes et il me demande de lui avouer que je n'aurai jamais de « profession » ? On termine ses questions dignes d'un fichier CNIL et il me parle ensuite de son statut particulier l'amenant à pratiquer des honoraires libres. Et c'est là que je l'écoute me faire un sketch de 10 ou 15 minutes sur les frais qu'il a, que soigner des gens à la CMU ne lui rapporte rien. Il me sort plein de papiers, ouvre des classeurs avec des photocopies que je n'ai pas envie de comprendre. Il me dit que pour vivre, il serait bien que je lui donne quand même quelque chose en fin de séance. Mettons 10 euros.

Donc ce type est expert judiciaire, il va prêter serment pour décider de la culpabilité des gens et moi, il me taxe 10€ au black ? Quelle grandeur !

J'accepte car je sais que sinon, je n'aurai pas le temps de voir un autre ORL. Pendant la séance, il ose me narguer en maudissant l'ISF. La séance se termine et il me mendie les 10€. Je sors mon chéquier (naïf), et il me reprend en m'expliquant que non, pas comme ça. Je paie en liquide.

S'ensuit une autre séance où il me refait le baratin version courte en me disant que je ne suis pas obligé de payer, mais que ce serait bien. Je critique un peu son matériel, lui expliquant pourquoi le test audio ne peut marcher correctement (un « clac » dévoile la présence d'un son que je suis censé deviner, certainement les condensateurs à changer, bref).

J'attends la dernière séance pour jouer un peu avec lui. Je sais que mes 10€ sont condamnés, mais j'attends gentiment qu'il me dise longuement que j'ai le choix mais que ce serait bien etc. Je le regarde, j'attends... il recommence comme un automate, sans honte. Je ne suis pas obligé, mais je ne vois pas trop comment sortir de la pièce sans me soumettre au racket. J'abdique. Je lui lâche ses 10€ pour ne jamais plus y remettre les pieds. D'ailleurs, vu son grand âge, peut-être que lui non plus n'y met plus les pieds.

Bref, ça m'apprendra à cocher une mauvaise case sur un dossier CMU de 8 pages.
 

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